Il est frappant de constater combien le centre GEORGE POMPIDOU, lieu d’expositions contemporaines et mémoire de ce que fut l’art à partir de 1903, peut nous renseigner sur l’ambivalence de l’art, capable dans le même temps d’être un lieu de perdition pour la beauté, le repoussant ou l’intriguant rivage de la laideur, et de demeurer par l’une ou l’autre de ses catégorie artistique l’étais du culte du beau.
Point besoin d’être un expert pour deviner à l’aulne des collections de tableaux de POMPIDOU, de 1903 à 1960 que la peinture, après avoir subi comme le désaveux de sa capacité à sublimer la nature, sous la concurrence de la photographie, bien plus précise et exacte en restitution à contrario de toutes les expériences plastiques dont la peinture est l’objet, durant cette période:de MONET à KANDINSKY, du pointillisme à l’absence de sujet pour l’abstrait – que si la peinture reste la discipline qui impose le rythme de ses fulgurances aux autres arts, son règne était compté; tandis qu’elle avait inauguré une tendance lourde de l’art contemporain : celle qui consiste à ne s’intéresser qu’à la laideur, au difforme, au monstrueux.
La raison en est-elle que l’art n’ayant plus de fonction sociale, ni machine à faire l’éloge de la belle société, ni relayeur des fondement esthétiques de la société occidentale, qu’à l’instar de sa vacuité il s’est mis également à recenser autant les diverses manières de ne rien proposer sinon des pitreries d’artistes, que d’explorer les diverses facettes de l’anomalie tant physique que conceptuelle – toujours est-il que cette recherche a fini par laminer le statut de locomotive des arts de la peinture. Elle qui de 1903 à 1960 menait toujours le bal, bal des horreurs initié par elle qui finit par ne plus compter après cette date , tandis que semble ne subsister que la laideur, pas même le souffle du bal. Pour la période d’après 1960 , jusqu’à nos jours les collections de Pompidou sont parlantes à cet égard : très peu de peintures, surtout des sculpture-installations où l’étrange prédomine sur le beau.
La collection recense des installations de l’an 2000, mais il semble que tout soit annoncé depuis la décennie 1990 : la peinture est morte, quand ne comptent plus que ceux qui sauront se rendre célèbre parmi les artistes pour leurs surenchères dans l’empire du laid, du kitch, de l’art jetable, éphémère et revendiqué comme tel, sous l’hospice de l’art conceptuel, ou quand l’intention artistique prime sur l’esthétique.
L’écueil pour le collectionneur étant de se retrouvé fourni d’une œuvre dont la cote est éphémère ou artificielle, comme il semble que ce soit le cas de DAMIEN HIRST célèbre pour ses animaux plongés dans du formol, dont la décote vient d’atteindre 60%, il y a peu. L ‘étrangeté du phénomène étant de voir surgir des artistes improvisés artiste du jour au lendemain, millionnaire du jour au lendemain, comme on le constate avec le courant du Street art, si tant est qu’il s’agisse d’un courant, et pas d’une énième réappropriation des techniques commerciales et esthétique du Pop art, ou plus avant des fameux Surréalistes qui décidément auront révolutionnés l’art au point de le dissoudre ! Reste cette expérience totale dont l’art est l’instigateur pour ses croyants comme pour ses artistes pourvoyeurs. Ceci ne nous renseignant pas sur les raisons pour lesquelles l’art contemporain des salons comme des musées voue son âme au détail des laideurs de notre société.
Il semble que l’art de la laideur ou de l’étrange ait ses époques. L’art des grotte préhistorique recense en même temps qu’il semble vouer un culte à ce monde plein de danger qui environne l’univers du chasseur peuplé d’animaux et d’esprits à respecter. L’art du masque dans les sociétés traditionnelles permet d’appréhender concrètement l’invisible que sent l’homme près de lui, dont l’art lui communique la part monstrueuse. Avec l’ère des grandes explorations maritimes, l’art occidentale profane prospère à montrer les faces curieuses des sauvages, préfigurant les catalogues de monstruosités, et les spectacles de cirques auxquels sont conviés jusqu’aux indiens d’Amérique des années cinquante. L’art contemporain n’est donc pas un exemple unique. Il y a que cette rupture avec les supports nobles, comme la toile en peinture, est trop récente pour ne pas apparaitre telle une déchirure de notre âme.
Si le goût du beau semble avoir fuit les préoccupations des artistes d’installation, comme il a moins préoccupé les peintres du XXème siècle, tous les rêves semblent s’être concentrés dans le seul septième art et la musique. Le cinéma compte à son actif plus de rêves de beauté que nulle part ailleurs. l’image y est reine et si elle peut cohabiter avec la démonstration de violence extrême, cela peut être pour mieux ébranler l’âme et participer à son édification et son élévation. La musique accompagne toujours nos rêves d’éternité et le culte des acteurs alimente les rêves de gloires, même s’il les appauvrit en les réduisant au seul désir de célébrité.
L’art est donc toujours la fabrique des grands hommes, le moyen par lequel un être sent qu’il peut être plus grand que sa solitude. Et tapis dans l’ombre d’aujourd’hui, j’en suis convaincu, les artistes de la lumière de demain sauront trouver la voie d’un art qui a assimilé les affres d’une recherche contemporaine qui fouille, bricole, cherche avec les chercheurs, quand elle ne fricote pas avec les techniques industrielles de production – pour s’installer dans un palais de règles esthétiques qui feront sens avec l’inspiration collective future. Palais dont les glaces se briseront à la génération suivante d’artistes, sous l’impulsion de nouvelles découvertes scientifiques ou impulsé par une autre révolution technologique. L’art, les arts ne seront que mineurs, cependant, s’ils renoncent à l’invisible.