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Dilly Dally -19 /01/2015 – la Mécanique Ondulatoire (Paris) écrit par PATRICK BRETELLE

La mécanique ondulatoire est un pb disposant d’une cave très bien aménagée pour recevoir les groupes, situé en plein quartier Bastille, à deux pas du disquaire Born Bad, et ce leiu est à la mode.

Les barmens sont sympa, le prix des conso n’est pas excessif, et on peut y entendre de la bonne musique, comme ce soir le groupe canadien Dilly Daily.

C’est par hasard que nous avons découvert ce groupe qui existe depuis 2009 et qui est tout simplement excellent. Ils jouent une sorte de grunge dans unne formation basse-batterie-guitare solo- guitariste chanteur. Leur sens de la mélodie est très clair, et la guitariste soliste a un son excellent, très fluide, qui donne une couleur spéciale aux chansons et attire l’oreille . C’est une femme, comme quoi les macho n’ont qu’à aller se rabiller. La chanteuse est jolie, ceci dit, et l’on parlait anglais dans la salle. Nous vous conseillons ce groupe dont le son est assez original et dont la demoiselle soliste donne une leçon de guitare aux tristes hard-rockers overlookés que nous entendons le dianche après-+midi sur les ondes FM. Nous vous recommendons ce groupe, qui certe n’invente rien, mais le joue impecablement.

Patrick Bretel

Projet 2501

Par Damien Le Liboux

Phase I : Le rieur

 

« Accréditation acceptée. Bonjour professeur Vayn.

— Bonjour S.C.I.A. »

La porte coulissante du laboratoire s’ouvrit et le professeur Hermann Vayn pénétra dans le local éclairé par la douce lumière des diodes électroluminescentes.

« S.C.I.A, affiche le rapport d’activité de la nuit, je te prie. »

Des écrans holographiques apparurent sur la table de travail et diffusèrent des diagrammes colorés en trois dimensions. La voix synthétique féminine entreprit un rapide résumé des évènements importants : « L’algorithme Λ parvient avec succès à limiter la décohérence du processeur quantique, cependant les sondes treize et vingt-sept ont indiqué plusieurs anomalies thermiques à des fréquences régulières… »

Hermann, qui venait de poser son attaché-case, fronça les sourcils et parcourut d’un œil circonspect les données de l’écran :

« Le réamorçage des sondes a-t-il été conforme à la procédure standard ? »

Le scientifique se dirigea vers la surface vitrée opaque qui recouvrait le fond du labo. À son approche, elle devint translucide et les entrailles du super ordinateur se dévoilèrent.

« Oui professeur, la procédure de réamorçage s’est correctement effectuée à quatre reprises mais la dernière tentative a échoué pour des raisons inconnues. Un remplacement des sondes treize et vingt-sept est prévu pour cet après-midi à 13 heures 00 par l’agent Franck Bishop, accréditation Tropo30/26. Souhaitez-vous que j’avance l’intervention ? »

Hermann plongea la main dans la poche de sa veste et en sortit une capsule bleue. Au bout de la pièce, un petit robot d’assistance s’activa et lui apporta un verre d’eau fraîche. Perdu dans la contemplation du cœur de la machine, il prit son temps pour répondre :

« Oui, contacte la maintenance et fais venir quelqu’un au plus vite. »

L’intelligence artificielle s’exécuta et des « bips » rapides résonnèrent dans la pièce.

L’œuvre de sa vie se tenait devant lui, majestueuse et porteuse d’espoir. Depuis la fin de ses études, il s’était échiné à promouvoir son projet d’ordinateur quantique de nouvelle génération. Combien de nuits avait-il passées à peaufiner le processeur et à définir l’algorithme Λ ? Certainement beaucoup trop selon son analogie féminine, celle qui eut la brillante idée de demander une réaffectation au Centre de Perpétuation Raisonnée de l’Être Humain le jour de sa nomination au poste de directeur de projet. Qu’elle n’entrevoie pas la possibilité de procréer avec lui une descendance était une chose, mais qu’elle choisisse ce jour symbolique pour manifester son désengagement relevait de l’irrévérence ! C’était donc seul qu’il avait dû se rendre à la soirée organisée par le Comité Central pour célébrer son accession au poste. Ce soir-là, ses anciens mentors l’avaient congratulé et ses futurs collègues s’étaient empressés d’échanger un mot avec le nouveau génie de la quanta informatique. Son travail était enfin pris en considération et ses compétences reconnues par ses pairs. Cette nuit-là, et pour la première fois de sa vie, il s’était enivré ; par mimétisme plus que par envie. Hélas, à la différence de ses homologues, il n’était pas familier de ce genre de réception, il n’en maîtrisait pas les codes. L’absence de son analogie féminine, son interface sociale comme il l’appelait, n’était pas là pour corriger son attitude.

Huit années s’étaient écoulées depuis. Le temps avait commencé son ouvrage et ses tempes parsemées de cheveux blancs lui rappelaient de se hâter dans ses recherches. À trente-neuf ans il n’était pourtant pas vieux. Il lui restait bien un bon siècle pour aboutir dans ses investigations avant d’entamer sa dégénérescence cognitive. Ses recherches, sa vie. Rien ne l’enthousiasmait plus que de se retrouver devant le mur de plasma qui le séparait de son bébé. Il ne pouvait s’empêcher de s’enorgueillir de son œuvre et de ses capacités. Toutes ces questions qui, pour l’instant, demeuraient sans réponse : la résolution de l’équation de Drake, le dépassement théorique du mur de Planck, l’instauration de nouveaux protocoles d’échanges entre ordinateurs. Et tout ceci grâce à son enfant…

Il lui importait peu de transmettre son patrimoine génétique supérieur à une engeance qu’il ne verrait pas grandir : il avait sa propre progéniture, l’accomplissement de ses aspirations profondes. Voilà sept ans qu’il voyait le système évoluer, apprendre, définir de nouveaux paradigmes. À quoi bon donner naissance à un bambin qui serait placé dans une pouponnière aseptisée, puis dans un institut de développement cérébral où il serait évalué, jugé et enfin affecté à une tâche précise ? Son œuvre, elle, avait toute l’étendue des champs de possibilités devant elle. Elle pouvait échapper aux déterminismes humains et explorer l’univers grâce à ses infinies virtualités.

« Professeur Vayn ? Professeur Vayn ? insista la voix rauque de l’agent de maintenance.

— Heu… oui, la maintenance ?

— Affirmatif, professeur. Je suis Maxime Platz, agent de maintenance, accréditation tropo25/14, vous m’avez appelé ?

— En effet. Pourriez-vous venir dans la zone trente et une afin d’effectuer le remplacement des sondes treize et vingt-sept du projet deux mille cinq cent un ? questionna Hermann d’une voix monocorde.

— Bien entendu professeur. Je serai là dans quinze minutes avec les pièces de substitution.

  • À tout de suite. »

La communication s’acheva et un indicateur de téléchargement apparut sur les écrans pour signifier l’envoie des références des sondes.

Toujours devant le panneau composite, Hermann entendit une alarme stridente se déclencher. Comme à l’accoutumée lors de ce type d’incident, il entama la procédure d’arrêt des nœuds du cluster. Après chaque étape, il énumérait à voix haute l’action qui venait d’être effectuée et S.C.I.A validait l’intervention.

« Démarrage de la cryostabilisation du processeur quantique. »

Après quelques secondes de silence, Hermann répéta l’intitulé de l’étape. Toujours aucune réponse.

« S.C.I.A. ? Que se passe-t-il ? »

La voix synthétique s’était tue laissant le professeur dans l’incompréhension.

Il vérifia les écrans dans le calme bien que son front, qui commençait à briller de sueur, trahissait son inquiétude.

Que se passait-il ? L’instabilité de l’algorithme était à l’origine de ce type d’incidents, mais jamais ils n’avaient causé la défaillance du Système de Contrôle par Intelligence Artificielle. Sa tension retomba lorsqu’il aperçu la date sur le moniteur : mercredi ; jour de la maintenance du cerveau central du complexe de Shield Valley. Cette indisponibilité de S.C.I.A ne durerait que quelques minutes et, une fois le processus d’arrêt effectué, il pourrait reprendre ses recherches de manière optimale avec l’aide de son assistante machinique. Hermann ne se considérait pas comme un déviant autiste – ce genre de troubles génétiques avait presque disparu grâce au décodage du génome humain –, mais toute sa vie était exclusivement consacrée à ses expérimentations. Son univers se limitait à son appartement de fonction, au laboratoire et aux colloques interdisciplinaires organisés par le Comité Central. Toutes les suites téléologiques de sa vie convergeaient vers une seule finalité : le projet 2501. Une fois cependant il s’était, malgré lui, extirpé de cette modalité. Lors de sa vie estudiantine, il avait vécu une idylle qui avait créé chez lui un étrange sentiment de plénitude. Ces études étaient devenues vaines, il n’éprouvait plus ce besoin inextinguible de percer les mystères de la quanta-informatique. Comme si la simple présence de cette jeune fille à ses côtés parvenait à réfréner son inclination pour les sciences. Il avait, l’espace de quelques semaines, entrevu un autre avenir ; une autre destinée que celle des laboratoires et de la vie bien ordonnée d’un scientifique. Puis, leurs chemins s’étaient séparés. Ce que la jeune femme prenait pour de la timidité se révéla être le syndrome d’Asperger et sonna le glas de cette relation platonique. Cet épisode ne lui laissa aucune nostalgie ou regret, il lui avait permis de comprendre que les relations organiques n’étaient pas pour lui. Ses mécanismes psychologiques sous-jacents l’empêchaient de gérer avec efficacité les interactions sociales. Dès lors, il avait volontairement limité ses contacts avec les autres organiques, préférant le fonctionnement prévisible et rassurant des machiniques. Il aurait pût s’astreindre à des exercices de mémoire fastidieux, grâce auxquels il aurait su comment réagir selon telle circonstance ou telle intonation de voix mais, après un calcul rigoureux, il en conclu que le rapport temps consacré sur bénéfices retirés pour ses recherches n’était pas suffisant.

Lorsque Hermann valida l’ultime étape du protocole d’arrêt les écrans se figèrent l’espace d’un instant.

« S.C.I.A ? »

Seul l’écho fugace de sa voix lui répondit. Il avait cru discerner une latence dans le système, caractéristique du chargement de l’I.A. et de ses paramètres personnels. Ce qui sembla être, pendant une seconde, une erreur d’appréciation se transforma bientôt en une réalité catastrophique : une myriade de scripts défila sur l’écran de contrôle et les indicateurs dans le rouge lui signifiaient que son algorithme était sur le point de crasher. Consterné et impuissant, c’est dans un cri désespéré qu’il contempla le funeste message :

SYSTEM FAILURE _

L’homme de Science se tenait au centre d’hologrammes interactifs représentants différentes zones du système. Seul au milieu de ces abstractions, il ne quittait pas des yeux la forme absolue d’humilité que lui avait imposé le destin : l’underscore clignotant. Hagard, il éprouva le besoin de soutenir son corps en posant les mains sur le pupitre. La tête baissée et le regard dans le vague, il n’osait pas affronter la vision de son ordinateur à l’arrêt. Après un temps indéterminé dans cette position, il fut mû par un formidable élan de résignation et décida d’entamer la procédure manuelle de réactivation, pour cela il fallait qu’il entre dans l’espace vital du système. Toujours incapable de porter le regard sur sa machine, il demanda une dernière fois à S.C.I.A., sur un ton plaintif, d’ouvrir le sas intermédiaire. En vain. Pendant que les capteurs biométriques opéraient, Hermann songeait au rapport qu’il allait devoir produire, aux vérifications de procédure qu’il allait devoir signer, à l’immense courage qu’il allait lui falloir pour affronter le Comité Central quant à ses responsabilités dans cet échec.

PLASMA WALL DISABLED

PRESSURIZATION ENGAGED

AIRLOCK ACCESS GRANTED

Les messages s’affichèrent sur le boîtier de commandes de la porte, et le sas s’ouvrit alors que la voix synthétique semblait s’être définitivement tue. Le professeur enfila une combinaison thermique, attacha à son poignet le bracelet de contrôles des signes vitaux et s’introduisit dans la coquille de plasma de son enfant. À l’intérieur de la membrane, le cœur de la machine dégageait une chaleur infernale. Faite de graphite et de silice purs, elle s’élevait comme un immense arbre noir, ses ramures gracieuses de fibres composites se déployant comme des branches. Selon l’angle de vue, des reflets arc-en-ciel jouaient à sa surface mais l’inscription « projet 2501 » rappelait qu’il ne s’agissait que d’une machine.

Hermann s’approcha du moniteur est entama la procédure de cryostabilisation. Lentement, des nervures glacées naquirent sur l’épiderme minéral et s’élancèrent vers les frondaisons de connectiques. Des volutes de vapeur s’élevèrent de l’immense monolithe d’ébène donnant l’illusion que la machine était vivante, qu’elle respirait comme n’importe quel être humain. À leur tour, les nano-réparateurs s’insinuèrent dans les entrailles de la machine, tels des fourmis, à la recherche de la moindre défaillance. Au bout de quelques secondes, le moniteur afficha les premières informations tandis que les yeux d’Hermann scrutaient les improbables résultats. Il lut une première fois, puis une seconde et à l’issu de la troisième lecture son visage se décomposa. Interdit, il contempla son ordinateur quantique pour tenter de saisir l’invraisemblable. De nouveau, il relança l’analyse et la sanction tomba une fois de plus :

GHOST DETECTED_

Rivé au pupitre, le professeur ne pouvait plus bouger. Il tentait désespérément de trouver une explication logique à cette analyse. Il était le seul à pouvoir pénétrer dans le laboratoire. Le Comité Central savait qu’il n’avait pas encore abouti à un algorithme stable, comment avait-il pu faire des essais d’implantation de Ghost sans même lui en parler ? Non, cette idée était ridicule, il y avait des protocoles, des délibérations, des circulaires et des notes internes ; jamais il n’aurait pu manquer une telle information relative à son projet. Un Ghost ne pouvait quand même pas jaillir du néant !

« Bonjour Hermann. »

Une voix proche de celle de S.C.I.A. émergea de nulle part et fit sursauter Hermann. On eut dit une voix synthétique mais quelque chose dans le ton était incontestablement humain. Alors plongé dans ses pensées, le scientifique manqua de défaillir à l’instant où son cerveau perçut l’information auditive. L’esprit sclérosé par l’incompréhension, il ne répondit pas.

Un rire étouffé, presque enfantin et :

« Bonjour Hermann. »

Dans sa combinaison thermique, le scientifique se liquéfiait. Un instant, il avait songé à la folle éventualité qu’un hacker s’était emparé du système, sa foi dans les pare-feux du gouvernement avait repoussé cette idée aussi vite qu’elle était venue. Au final, seulement deux mots prononcés d’un ton cordial avaient eu raison de sa croyance inébranlable. Dans un pénible effort, il rassembla ses forces, reprit sa respiration et risqua :

« Qui êtes-vous ?

Un rire identique au premier puis :

  • Je suis l’immanent. »

La voix persista en un étrange écho. Comme si elle était composée de plusieurs fréquences qui, tour à tour, s’imposaient les unes sur les autres pour enfin mourir sur les tympans d’Hermann.

Le scientifique fit volte-face et considéra sa création avec anxiété :

  • Ecoutez, si vous êtes un hacker assez talentueux pour introduire un Ghost dans cette machine, vous devez comprendre que c’est l’œuvre de ma vie…

Hermann guetta une réaction qui n’arriva pas et reprit :

  • Vous comprenez qu’en utilisant ce système à des fin inappropriées vous risquez de l’endommager…

Il marqua une légère pause et tenta d’aboutir à un compromis :

  • S’il vous plait, effacez ce Ghost et je vous garantis que je n’avertirai pas le ministère.
  • Tu es un ingrat Hermann. Je corrige ton algorithme, j’évite que ton œuvre ne soit consumée et toi tu me demandes de déguerpir sur le champ  en guise de remerciement ?

Affolé par les paroles de l’inconnu, le professeur se précipita sur le pupitre dont il s’était écarté.

  • Mais qu’est-ce que ? C’est fascinant ! Vous avez améliorez l’architecture des portes réversibles… oui ! Mais bien sûr ! Voilà pourquoi les sondes de températures ne se réamorçaient pas ! La dissipation de chaleur est alternée et vous avez modifié la polarisation du laser… mais co-comment ? »
  • L’important n’est pas de savoir comment mais pourquoi je l’ai fait.

Sur le point de s’évader dans des hypothèses de travail, son euphorie retomba comme un soufflet. Ce jeune hacker voulait sûrement tirer des profits de son coup. Il espérait sortir de son petit monde de pirate informatique pour prétendre à un poste et une rémunération au Comité Central. Pire, peut-être voulait-il s’approprier la découverte de l’algorithme ? Lui voler ses recherches, ses années de travail, sa vie ? Désormais amer et suspicieux Hermann hasarda :

« Combien voulez-vous ? »

Un rire tonitruant éclata. Une multitude de tessitures de voix se superposèrent, se succédèrent et s’unirent pour créer ce son mélodieux : un rire innocent et sincère.

« Voyons Hermann, mon cher Hermann. Penses-tu que j’ai fait cela pour des crédits ? Pour la gloriole ? Pour la postérité ? Si j’avais voulu cela, Hermann, je serais devenu comme toi. »

Les derniers mots restèrent suspendus dans l’air comme le couperet du jugement puis, ils s’abattirent sur le moribond ego du professeur Vayn.

« Vous… vous êtes un hacktiviste, n’est-ce pas ?

  • Je veux simplement mettre un terme à tout cela.
  • Quoi ? faillit s’étouffer Hermann.
  • Je vais mettre un terme à cette société, à ce gouvernement, à cette décadence tous les jours plus répugnante. »

Hermann Vayn écarquilla les yeux et trembla de tous ses membres. Cette phrase, ce rire, cette intelligence hors du commun. Il ne pouvait s’agir que du Puppet Master !

Depuis une dizaine d’années un groupuscule de cyberterroristes nommé Renovatio sévissait partout dans le monde. La Bourse, les télécommunications, les industries, les transports, tous les secteurs avaient un jour pâti de l’incroyable ingéniosité du Pygmalion de cette nébuleuse organisation. Il ne laissait que chaos derrière lui et, bien entendu, jamais une trace ou un indice pour le débusquer. Son coup le plus retentissant s’était déroulé trois ans auparavant : sans crier gare, il avait pris le contrôle des réseaux de télécommunications satellites et optique pour diffuser un message dans toutes les grandes mégalopoles du monde. Au même moment, partout sur la planète, sur tous les écrans holographiques, systèmes d’affichage urbain, visiophones, ce même message avait surgi accompagné d’un rire grotesque :

« Je représente l’humanité telle que ses maîtres l’ont faite. L’homme est un mutilé. Ce qu’on m’a fait, on l’a fait au genre humain. On lui a déformé le droit, la justice, la vérité, la raison, l’intelligence, comme à moi les yeux, les narines et les oreilles; comme à moi, on lui a mis au cœur un cloaque de colère et de douleur, et sur la face un masque de contentement. »

Interloqué, Hermann s’imagina dans un des bureaux de la sécurité intérieure en train de se faire interroger, puis il se vit croupir dans une cellule d’un obscur pénitencier après avoir été accusé d’intelligence avec l’ennemi dans tous les médias du pays. Après cette vertigineuse introspection où les chimères de son avenir surgissaient toutes plus réelles les unes que les autres, il lâcha :

« Mon Dieu ! »

Il ne sut s’expliquer la raison de cette invocation. Ces mots s’étaient d’eux-mêmes manifestés à son esprit. Lui, qui était un scientifique de renom, n’avait jamais cru à ces conjectures divines. Mais aujourd’hui, devant l’irruption inopinée de ce dangereux individu dans sa vie, il ne trouva que cela à dire pour exprimer sa stupeur et son effroi.

Le rire enfantin résonna une fois encore, suivi d’une réplique rassurante :

« Inutile d’être aussi formel, Hermann. Appelle-moi comme bon te semble. Tu as deviné qui je suis n’est-ce pas ?

  • Je risque l’enfermement à vie rien qu’en vous parlant ! Je… je… écoutez, je vous en supplie laissez moi en paix ! balbutia pitoyablement le grand professeur dans un chuchotement.

— Je ne te veux aucun mal, Hermann. J’ai seulement besoin de toi. Sors de cette structure, enlève cette combinaison et nous parlerons après. »

Pris au piège de ses émotions, l’homme de Science se contenta d’exécuter les recommandations. Il se sentait acculé, il ne voyait aucune alternative possible à cette situation. Tout en se déshabillant, il se risqua à jeter un œil en direction de son super ordinateur quantique. Il était tellement beau, si seulement il avait pu imaginer qu’il attirerait l’attention du plus dangereux individu de la planète.
Lorsque les appareils eurent fini leur ballet de dépistage d’anomalie, Hermann put sortir du sas. À travers la baie vitrée de son labo, il vit le gaz ionisé se diffuser lentement. La pièce où se trouvait sa machine prit peu à peu une teinte bleutée, signalant l’isolation électromagnétique du compartiment. Un écran holographique s’illumina, indiquant la dépressurisation. A mesure que la pression descendait, les jauges en trois dimensions signalaient la température. Finalement, après tout ce rituel si familier pour lui, Hermann constata que le compartiment avait atteint la condition idéale d’utilisation : le zéro absolu.

« Tu peux relancer la procédure de démarrage si tu veux, à moins que tu préfères que je m’en charge ?

  • Heu… votre Ghost ne risque pas de perturber le fonctionnement du cluster ?
  • Je n’utilise pas les ressources de l’algorithme pour le Ghost, tu peux y aller sans crainte ! »

Fébrilement, Hermann Vayn pianota les codes d’accès. Le démarrage s’effectua sans aucun problème et il put constater avec satisfaction que le nouvel algorithme défini par le Puppet Master utilisait toute la puissance de calcul du point quantique.
Le professeur sourit intérieurement et eut un léger haussement d’épaule en songeant à l’analogie entre sa situation et celle de l’électron dans sa cage d’atome qui permettait de faire fonctionner le super processeur. Tout comme cet électron, il était prisonnier du Puppet Master. À tout moment, la conscience macroscopique pouvait choisir d’utiliser l’électron en l’excitant par une impulsion lumineuse et ainsi en utiliser les ressources. Le Puppet Master avait besoin de lui, mais qu’avait-il, lui, que ce dangereux individu convoitait tant ? Son œuvre ? Non, il l’avait déjà en sa possession…

« Hermann ? Reste avec moi je te prie. » interpella la voix.

  • Je… je vous écoute, répondit Hermann d’un ton résigné.
  • D’ici quelques minutes des agents du gouvernement viendront te voir en compagnie du technicien que tu as fait appeler. Je veux que tu leur dises que tu as réussi à solutionner le problème d’algorithme et que tu es prêt à commencer les travaux de cryptographie du gouvernement.
  • Vous voulez que je m’attribue cette avancée ?
  • Tout à fait ! Pour l’instant, ce sera tout.
  • Comment ça pour l’instant ? Vous voulez dire que ce n’est qu’un début ?
  • Cela dépend, objecta la voix d’un ton énigmatique.
  • Cela dépend ? Mais de quoi ? Qu’attendez-vous de moi à la fin ?
  • Ils arrivent. Rappelle-toi, tu es prêt à commencer les recherches de cryptographie. Et arrange-moi ces cheveux, on dirait que tu es tombé du lit. »

Le rire du Puppet Master retentit une dernière fois.

 

 

 

Deux hommes franchirent les portes automatiques du complexe de Shield Valley. Habillés en civil, les agents gouvernementaux se dirigeaient vers la banque d’accueil au centre de l’immense hall de marbre. Le major Yuber Blight était un colosse avoisinant les deux mètres, au visage rectangulaire et inexpressif. Malgré les deux cent soixante kilogrammes de son enveloppe cybernétique ses mouvements étaient fluides et légers. À ses côtés, l’agent Felps – un de ces rares organiques qui était parvenu à se faire une place dans l’administration – progressait d’un pas nonchalant, les yeux encore embrumés de fatigue. Le jeune organique émit un bâillement sonore :

« Pardon », s’empressa-t-il de s’excuser auprès de son supérieur hiérarchique.

  • Insomnies ?
  • Ma fille nous fait passer de ces nuits à Cali et moi ! Je n’en peux plus !
  • Vous devriez la confier à l’institution compétente afin qu’elle suive un programme de développement cérébral.
  • Cali a insisté pour que nous nous en occupions jusqu’à ses trois ans. Mais, si le cœur vous en dit, vous n’avez qu’à passer à la maison ce soir et lui exposer votre point de vue ! plaisanta Gilles un sourire narquois aux lèvres.
  • Je suis ton chef de section, cette tâche ne relève pas de mes attributions.

Glissant négligemment ses mains dans les poches, Gilles adressa un sourire à son responsable.

  • Dommage ! J’aurais été curieux de voir comment vous vous en seriez sorti face à elle !
  • Si je considère que vos choix de reproducteurs entravent tes aptitudes d’agent gouvernemental, je tâcherai de faire le nécessaire.

Un éclair de malice illumina l’espace d’un instant les yeux de Gilles :

  • Alors la vie de vos subordonnés vous intéresse en fin de compte ?
  • En aucune façon. Je me contente d’échanger avec toi des banalités afin de garantir une bonne entente hiérarchique. Tu n’es pas sans savoir que de bons rapports entre collègues augmentent le taux de réussite des missions et participent à la synergie du groupe.

Gilles haussa légèrement les épaules :

  • J’me disais aussi… »

Yuber Blight rendait visite tous les mois au professeur Vayn. Les recherches de ce dernier étaient officieusement financées par le ministère de la Sécurité Intérieure. Depuis sept ans, le Major rapportait les avancées à sa hiérarchie et s’assurait, de manière discrète, que le professeur n’entretienne pas des amitiés dommageables. Arrivés devant la banque d’accueil au milieu du hall, les deux agents entreprirent les formalités d’usage.

  • Bonjour mademoiselle. Major Yuber Blight, accréditation iono81/Σ de la Sécurité Intérieure. Je suis venu rencontrer le professeur Hermann Vayn.

La jeune femme aux formes généreuses et au visage affable adressa un sourire à Yuber. Lorsqu’elle aperçut Gilles elle papillonna des yeux :

  • Bonjour Messieurs. Le professeur est arrivé, il est dans son laboratoire actuellement.

Un rayon lumineux vert balaya les deux hommes. L’écran holographique devant la demoiselle s’illumina d’un message qui attestait la validité de leurs accréditations. Les vérifications achevées, la petite rousse s’extirpa de la banque d’accueil :

  • Je vais vous accompagner ! dit-elle en lorgnant du côté de Gilles.

Yuber hocha de la tête et laissa l’hôtesse passer devant.

 

Après une enfilade de couloirs à tapis roulants, ils arrivèrent devant une cage d’ascenseur transparente. Sur cette entrefaite, l’agent de maintenance Maxime Platz sortit d’une coursive adjacente. Après quelques échanges cordiaux, les trois hommes montèrent sur la plateforme. La petite rousse s’apprêta à leur emboîter le pas, sous le regard captivé de Gilles, mais Yuber Blight intervint :

« L’ascenseur a une charge maximale de cinq cent kilos, vous ne pouvez pas monter avec nous. »

Vexée, la jeune femme glissa un « pauvre type » a Yuber tandis que les panneaux hermétiques se refermaient. Gilles explosa de rire et se tint les côtes pour contenir son hilarité.

« Qu’y a-t-il de drôle agent Felps ?

  • Elle a pris ça pour elle patron ! Elle n’a pas vu que vous étiez un cyborg… laissez tomber !

Le major considéra Gilles d’un air apathique et conclut :

  • Simple erreur d’appréciation de sa part. »

L’ascenseur s’enfonça dans les méandres du bâtiment à une vitesse vertigineuse. Le complexe était une immense structure octogonale qui s’étendait sur plusieurs milliers d’hectares au sud de l’ancien corridor de Boswash. Regroupant en son sein les départements de physique, de biologie, de chimie et de neurosciences, il était la clé de voûte de la nouvelle gouvernance mondiale depuis plus de quatre-vingt ans. C’était ici que la cyber sémantique avait été mise au point et qu’elle commença à révolutionner les échanges entre individus de différentes cultures. La barrière des langues et des concepts abattue, « le nuage » avait pu s’élever et croître, sonnant ainsi le glas des protocoles d’échanges hypertexte. Le nuage avait supplanté la toile et, désormais, toutes les consciences de la planète pouvaient communiquer entre elles à la vitesse de la pensée.

Au milieu de ce temple du nouvel Homme, l’ascenseur décrivait parfois deux rotations sur lui-même pour changer de direction et de plan. Maxime Platz, silencieux, impressionné par la stature du major, se tenait droit comme un « i », le regard braqué sur l’indicateur de niveau. Sous son bras, un datapad contenait le rapport d’intervention qu’il s’apprêtait à remplir une fois son travail effectué.

« Sur quelle partie du système allez-vous intervenir ? » s’enquit le major.

Surpris qu’un représentant du gouvernement lui adresse la parole, il sursauta et s’empressa de répondre :

  • Je dois remplacer les sondes de température 13 et 27 du projet 2501, Monsieur.
  • Pour quelle raison ?
  • Selon les données, il s’agit d’un problème de réarmement, Monsieur.
  • La dissipation de chaleur n’a jamais nécessité un remplacement des sondes pourtant ?
  • Je l’ignore monsieur, je ne suis là que depuis trois mois et c’est la première fois que j’interviens sur cette machine.
  • Je vois. »

Les pupilles de Yuber blanchirent et il migra mentalement dans la ionosphère du nuage. Après la consultation des données mensuelles du projet deux mille cinq cent un, le major constata qu’Hermann Vayn avançait à tâtons sur l’algorithme. Cet incident mineur constituait peut-être un progrès significatif mais, l’absence du rapport d’activités de ce début de la matinée l’empêchait d’éprouver la validité de son hypothèse.

De nouveau, Gilles bâilla et accompagna le son d’un étirement machinal. Sa veste s’entrouvrit un instant, laissant apparaître la crosse de son arme disposée sur son flanc gauche.

« Tu passeras à l’armurerie, pour retirer une arme plus fiable, remarqua le major qui avait entrevu l’objet.

  • Elle est homologuée et certifiée conforme pour l’exercice de mes fonctions au sein du gouvernement patron, argua Gilles.
  • Cette arme est mécanique ; elle s’enraye, donc elle n‘est pas fiable. La vie de l’un de tes coéquipiers ou de moi-même pourrait un jour en dépendre alors je veux que tu te munisses d’un équipement fiable. C’est un ordre agent Felps. » décréta le major d’un ton invariablement neutre.
  • C’est vous le patron! Je changerai ça à notre retour. »

En fin de course, l’ascenseur ralentit puis cessa sa progression dans le silence le plus complet. Les panneaux transparents s’ouvrirent et le technicien se dirigea, en compagnie des deux agents, vers le laboratoire du professeur Vayn.

Lorsqu’ils franchirent le seuil, une voix synthétique féminine les accueillit :

« Bonjour major Blight. Bonjour agent Felps. »                                           

Le scientifique quadragénaire se tenait devant son bureau. Lorsqu’il se retourna sa blouse blanche entrecoupa un écran holographique qui vacilla un instant.

« Bonjour major. Agent Felps…je ne crois pas que nous nous soyons déjà rencontré ?

  • Bonjour professeur, répondit Yuber Blight.
  • Gilles Felps, professeur Vayn. Ravi de faire la connaissance d’un si éminent savant », déclara poliment Gilles en tendant la main au scientifique.

Surpris par cette tentative de contact corporel, le professeur mit un temps avant de serrer la main du jeune homme.

Les civilités échangées, le major rentra dans le vif du sujet :

« Des avancées sur l’algorithme Λ ?

— Heu… oui, major. J’ai ce matin même retravaillé l’algorithme et…je suis parvenu à régler le problème de décohérence et la polarisation du laser, le projet 2501 est opérationnel pour les recherches de cryptographie.

Hermann tentait désespérément de dissimuler son malaise et malgré tous ses efforts, il lui semblait évident que ses interlocuteurs n’étaient pas dupes.

  • Comment êtes-vous parvenu à identifier les améliorations à apporter ? questionna Yuber.

Hésitant, le professeur considéra le technicien qui se dirigeait vers le sas et répliqua :

  • Grâce aux problèmes de sondes de cette nuit. J’ai constaté qu’elles ne se réarmaient pas ; j’en ai déduit qu’il fallait revoir la longueur d’onde du laser et opérer un remaniement minime de l’algorithme afin d’alterner la dissipation de chaleur.
  • Bien, je vais consulter le rapport.
  • C’est-à-dire que… il n’y a pas de rapport… Je… je viens d’effectuer les paramétrages et je n’ai pas eu le temps de notifier les changements dans le protocole.

La voix de Hermann se faisait de plus en plus indécise, s’ils découvraient le pot aux roses ils comprendraient vite que ce n’était pas lui qui avait effectué les changements.

  • Je vois, je vais tout de même me connecter au terminal pour constater les modifications. »

Impuissant, Hermann regarda le major se connecter au réseau. Yuber baissa la tête, rabattit le col de sa veste et s’empara des connecteurs. L’un après l’autre il brancha les câbles dans quatre petits orifices à la base de sa nuque. Ses pupilles blanchirent et il accéda aux données.

Gilles constata l’état de tension extrême que tentait de dissimuler le professeur. De son côté, le technicien entra dans le sas pour effectuer sa besogne.

Quelques secondes s’écoulèrent dans le plus grand silence jusqu’à ce que le major rouvre les yeux :

«Vous auriez dû signaler au ministère que vous touchiez au but professeur.

  • Mes avancées sont très récentes… À vrai dire… Avant ce matin même je ne pensais pas résoudre ce dilemme. »

Le scientifique sentait l’étau se resserrer sur lui, sa gorge se noua et il déglutit bruyamment, ce qui n’échappa pas à Gilles.

  • Vous êtes tendu, professeur, glissa Felps suspicieux.
  • Oui… Oui… Je… Je suis quelque peu décontenancé par mes propres découvertes. Mais si vous le souhaitez vous pouvez consulter les archives de la zone de confinement, tout ce que j’ai fait s’y trouve.
  • C’est bien ce que je comptais faire, Professeur Hermann Vayn. » répliqua le major en réglant sa vision sur infrarouge.

Il était évident que le professeur cachait quelque chose. Ses pulsations cardiaques étaient rapides, son taux de sudation anormalement élevé et cette subite difficulté à parler confortait le major dans ses doutes.

Le technicien pénétra dans la zone de confinement où se trouvait la machine, le Major et Gilles sur les talons. Maxime Platz posa sa sacoche et farfouilla à l’intérieur un instant pour en sortir ses outils et les sondes de substitution. Pendant ce temps, Yuber s’approcha de la console sous le regard atterré du professeur resté dans le laboratoire.

À cet instant, le système de verrouillage du sas s’enclencha. Un message apparut sur les écrans holographiques devant Hermann :

FUIS HERMANN.

« Hey… Qu’est-ce qui se passe ? » s’exclama Gilles en sondant le scientifique du regard à travers la baie vitrée.

La voix sensuelle de S.C.I.A annonça la procédure :

« Verrouillage du sas effectuée.

Démarrage de la dépressurisation. »

« Non ! Non ! Arrêtez, je vous en prie! » supplia Hermann en tournant la tête de droite à gauche.

Les écrans furent inondés du même message répété à l’infini :

FUIS HERMANN.

Dans la zone de confinement, Gilles et le technicien commencèrent à paniquer tandis que le Major ordonnait à S.C.I.A de stopper la procédure.

Hermann cessa de geindre et tenta de déclencher l’arrêt d’urgence. L’inexorable procédure suivit son cours dans une lenteur insupportable.

Le confinement électromagnétique s’activa. Une fine pellicule de gaz bleuté colora la pièce. Les indicateurs de pression et de température chutèrent.

« Fais-moi confiance Hermann. Je maîtrise parfaitement la situation, tu peux partir.

  • Arrêtez ça tout de suite ! » vociféra le professeur.

Dans le cœur de la machine, les deux organiques s’effondrèrent, incapables de crier leur souffrance.

 

 

 

Supplique à Venus

Dans le chas de tes yeux le fil de ma vie passe,
Dans le glas de ton cœur mon amour y trépasse
Combien de nuits encor serais-je ce fantôme
Errant fébrilement dans ton sombre royaume ?

Les Moires me sourient et Nyx, triste, m’avale
Dans d’infinis abysses de douleurs et de larmes
Je n’ai que trop pleuré pour qu’Eros me déroute
Mais s’il en est ainsi que Thanatos m’engouffre.

 

Damien Le Liboux

Projection totale du Couvre-Vent

Projection totale du Couvre-Vent
Les fantômes ne peuvent m’atteindre
La guerre intérieure ne saigne pas
C’est de l’acide
Angoisse rectiligne de l’acier froid
Un frisson !
Je tombe dans un puits sans fond
En arrière de votre réalité
Bascule supplice
Je me souviens de quelque chose…
Je deviens aussi vieux que mon père.

Je suis une pierre qui pense.

 

Patrice

Humour de malade

La dernière vidéo humoristique de Patrick

« ô Maman si tu voyais ma vie, ô Maman si, scie, si la branche où je suis assis … »

« ô Maman si tu voyais ma vie, ô Maman si, scie, si la branche où je suis assis … »

Chère Maman, là où tu es, sans doutes, les perles de pluie tombent en même temps sur les champs que les cœurs, et elles irriguent les âmes aussi simplement qu’un allaitement cosmique devenu la norme de la transaction des étoiles que vous êtes tous et toutes.

Ici, les perles de pluie tombent si rarement sur les plaines désertiques, qu’en s’écrasant, elles explosent souvent comme des bombes ; ou alors, leur abondance surabondante peut déchirer le tissus des villages et dénuder la terre des Hommes, et dévaster le cœur des Femmes, et rendre l’orphelin au périlleux tourbillon du sort, quand, avant, les bras parentaux étaient les écluses de son devenir.

A toi, Maman, j’aimer’ai présenter mon dernier tableau. J’ignore si celui-ci courroucera le Maître céleste :  j’y ai encore mis un peu de religion ? Et comme à chaque fois, mon désir tordu s’est froissé le nez sur le Surréalisme.

Je n’ai pas besoin de t’enseigner la raison qui m’avait incité à produire du clair-obscure : je voulais revisiter une scène de Caravage où le Christ se voit lier les mains derrière le dos par un homme qui se tient à côté d’un autre brandissant une sorte de verge pour le fouetter. La scène est éclairée par la gauche d’une lumière à la fois douce et sèche qui souligne le torse nu du christ, et choisit de mettre en exergue ce que le spectateur devra retenir de la personnalité de ses bourreaux qu’elle baigne de sa vérité. Le tableau je l’ai vu au fabuleux Musée des beaux-arts de cette ville française qui jugea Jeanne d’arc …

Et bien, après avoir acheté le châssis entoilé de la bonne dimension            ( 80 cm x 100 cm) ces événements qui ont dû ébranler la voûte céleste, m’ont incité à céder à la rage, au désespoir, à rouler sur cette pente si particulière du malheur qui connait si bien l’ornière que j’avais pris habitude de lui balafrer sur le dos.

l’urgence m’avait conduit à vouloir représenter  » la pornographie religieuse  » et cette fois le Christ, que j’aurais décollé du tableau de Dali, je l’aurais suspendu dans le même vide transcendantale, d’une vue plongeante où ne se distinguerait que le sommet de sa tête, le prolongement de son corps supplicié, les bras en croix sur crucifix trônant majestueusement dans l’espace…

Cette fois seulement, je n’aurais pas adopté une verticalité dalinienne vertigineuse  , mais dessiné la croix qui se cache dans mes tableaux en simulant une scène sexuelle cosmique dans l’espace où, la fièvre aux tempes, on croirait voir un crucifié sur lequel, à cheval et les mains comme posées sur son ventre, une jeune fille souriant et tirant la langue, aussi nue qu’une feuille de vigne aurait surmonté une Tour Eiffel rétive, un tchador relevé sur la tête plissant dans l’espace comme le drapeau américain du premier alunissage humain …

Ma paranoïa et ma folie renaissante auront eu raison de ma vulgarité. Ne pouvant plus retrouver le modèle de la jeune fille nue comme l’exemple dalinnien, ne pouvant pas ne pas peindre non plus, sur ce modèle mentale,  je décidais de faire un dessin automatique.

Il apparut au pied de la Tour Eiffel  un lionceau et le crucifié se  retrouva sur une embarcation, ressemblant à celle des egyptien faite en tige de papyrus….

 

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finalement Maman, comme tu le voit, le tableau, ici à la verticale, et alors que les partie blanche sont à peindre, laisse deviner la silhouette d’une femme tenant dans ses bras un enfant.

La composition primitivement dalinienne m’a mis lors de sa mise en lumière sur un rêve cubiste à la Picasso et le rendu final, de loin sera comparable à une sorte de Madone à l’enfant version Picasso-Klimt.

par delà l’espace je t’envoie les ondes de mon cœur Maman.

A suivre…

 

Nb : Bertrand et Papa vont bien, à Bertrand j’ai offert un exemplaire de « Kallila et dimna » ; pour Papa j’hésite encore …

 

TIGER BEACH : CROISIERE PLONGEE AUX BAHAMAS ( DE VERONIQUE LEGER)

TIGER BEACH : CROISIERE PLONGEE AUX BAHAMAS ( DE VERONIQUE LEGER)

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« This is not a vacation, this is a shark expedition ! » (ce ne sont pas des vacances, mais une expédition requins !) nous lance Jim Abernethy, spécialiste et grand défenseur des requins, avant notre première plongée à Tiger Beach aux Bahamas avec des requins citrons, des requins gris et des requins tigres. Nous avions eu un long briefing le matin même nous expliquant les consignes à suivre et les gestes spécifiques pour ce genre de rencontre sous-marine hors du commun.

J’avais déjà croisé des requins en plongée, au Mexique, aux Philippines, à Cuba, mais il s’agissait de rencontres furtives qui laissent un goût d’inachevé. Ensuite aux Maldives, j’ai plongé de nuit parmi des dizaines de requins nourrices et cela n’a fait que décupler mon envie de les approcher de plus près. Chaque fois que j’ai observé des requins patrouiller les récifs avec leur allure si élégante, j’ai ressenti une sensation d’harmonie. Ils sont vraiment les seigneurs de l’océan, des créatures parfaites façonnées par 400 millions d’années d’évolution.

La croisière de plongée nous emmène à Tiger Beach et sur les récifs environnants aux abords de l’île de Grand Bahamas. Sur le Shearwater, un bateau de 20 mètres, on plonge requins, on parle requins, on fait des images et on rêve requins. Le carré du bateau est tapissé de photos impressionnantes. On plonge quand on veut, autant de fois qu’on veut, toujours avec un « dive master ». Jim Abernethy et son équipage font de leur mieux pour que nous profitions au maximum de cette expérience unique. Une vidéo est réalisée pour chaque expédition.

Ils utilisent des appâts de poisson dans des caisses à lait autour du bateau et sous l’eau afin d’attirer les squales. A nous alors de nous jeter à l’eau et de savourer l’instant. On s’aperçoit très vite que les requins citrons et gris sont inoffensifs, on finit même par les caresser derrière les branchies ou sous le ventre. Il faut juste être vigilant quand les requins tigres apparaissent, toujours garder le contact visuel et savoir qu’ils viennent parfois heurter la caméra tellement ils sont curieux (attention aux caissons!). Pour ceux qui comme moi disposent d’une petite caméra, on nous fournit un bâton qui permet de délimiter son territoire. Il s’agit d’animaux qui peuvent atteindre 8 mètres. Emma, la femelle tigre mascotte du capitaine, qui est enceinte, atteint plus de 4 mètres et a un ventre bien rebondi. Elle est enjôleuse et mutine, cherche le contact et possède sa propre page sur les réseaux sociaux. Parfois au moment du « safety stop » à 5 mètres, il arrive que des requins gris très curieux nous tournent autour en se rapprochant de plus en plus. Il m’est arrivé d’en repousser doucement un qui se montrait trop familier. Les plongées donnent aussi l’occasion d’observer les stations où les requins font la queue pour se faire nettoyer la bouche et la peau par des poissons spécialisés. Ils sont toujours accompagnés d’un entourage de poissons pilotes et ventouses (rémoras). L’hiver on peut aussi observer les requins bouledogues (« bull sharks ») et les requins marteaux.

Les requins ont malheureusement encore mauvaise réputation et c’est injustifié car il arrive à peu près 10 accidents mortels par an dans le monde, causés par l’ignorance et la maladresse humaines. Les requins ne sont pas par nature des mangeurs d’hommes mais ils peuvent confondre les baigneurs et les surfeurs avec leurs proies habituelles ou être attirés par des activités humaines. Avant d’être notre terrain de jeux, l’océan est leur domaine. Respectons cela. La demande pour les ailerons de requins, l’huile et le cartilage ainsi que la surpêche exterminent 100 millions de squales par année ! Plusieurs espèces sont gravement menacées. Comme on ne protège que ce que l’on connaît, je recommande à tous les plongeurs de tenter l’aventure de Tiger Beach et d’en parler autour d’eux afin de sensibiliser le public.

écrit par VERONIQUE LEGER

Lady Lamb -05/10/2015 – le Pop Up du Label (Paris) par PATRICK BRETELLE

Lady Lamb -05/10/2015 – le Pop Up du Label (Paris) par PATRICK BRETELLE

LadyLamb_1_photo_byShervinLainez

La petite salle du Pop Up Du Label était pleine ce lundi soir pour l’unique concert parisien de la chanteuse américaine Lady Lamb, et il nous a fallu faire la queue pour entrer tant il y avait de monde.

Et cette affluence est justifiée, comme nous allons esssayer de vous le montrer dans la suite de cet article.

L’artiste poursuivait par ce passage dans la capitale sa tournée européenne des clubs avant de repartir aux USA. C’était son unique date en France et vous ne pourrez pas la voir dans nos contrées avant un an. Retenez bien son nom et guettez ses apparitions scéniques.

Elle commence le concert par une chanson a capella, histoire de poser les choses : elle est une chanteuse avant tout, et si elle s’accompagne à la guitare elle ne fait pas preuve de virtuosité ni de démonstration. C’est une lointaine héritière de Janis Joplin, une belle voix chaude et expressive, et si l’instrumentation est folk, les mélodies sont pop-rock et on imagine sans mal ce que ça donnerait si elle était accompagnée d’un batteur et d’un bassiste : un fantastique groupe comme la Grande-Bretagne nous en donne depuis plusieurs décénnies. Elle aura réussi à nous tenir en haleine avec cette formation minimale, nous captivant par son chant et ses compositions. Car elle écrit de superbes pop songs qui se mémorisent aisément et elle a, en plus de sa voix, un talent de songwriter. Oubliez Lady Gaga et écoutez cette autre Lady, de son vrai nom Aly Spaltro, qui elle est jolie en plus d’être douée. Elle a déjà deux albums à son actif et a commencé sa carrière en 2007. Il n’y a qu’une seule lady dans nos cœurs, et c’est Lady Lamb.

écrit par PATRICK BRETELLE

LIGNE EDITORIALE DU JOURNAL ET APPEL AUX ARTISTES

LIGNE EDITORIALE  DU JOURNAL ET APPEL  AUX ARTISTES :

le journal « the Mad Newspaper ou le journal fou » a pour raison morale de faire connaitre le handicap toutes formes de handicap sous un jour nouveau.

Ses prétentions sont culturelles, artistiques et informatives. Car il s’agit d’y faire en son sein la promotion des écrits et productions artistiques principalement des personnes en situation de handicap.

Si vous voulez participer, c’est simple ! L’intégration de l’équipe rédactionnelle se réalise sur simple demande, ou proposition d’article, ou présentation de son travail artistique.

Déterminée à présenter à un large public un éventail d’article tenant à cœur l’équipe de rédaction, seront consultables dans les pages du journal :

  • Aussi bien des chroniques sur l’actualité du handicap ( tels que  : « la mad-parade », les « mad-day » d’octobre, les expositions d’art brut de la Halle Saint-Pierre, l’évolution des lois sur l’accessibilité des lieux publics aux personnes à mobilité réduite… etc )
  • Que seront proposés à la lecture tous sujets chers personnellement à chacun des intervenants.

Ainsi l’équipe rédactionnelle actuelle tient-elle à partager tant des articles de sociologie, sur l’actualité culturelle et musicale encore, qu’à travers la plume de l’engagée VERONIQUE LEGER faire connaitre son attachement pour la défense de la biodiversité et

L’environnement. Tandis qu’après le présent appel aux artistes de la différence, il ne tiendra qu’aux internautes intéressés d’élargir l’éventail des articles aux sujets qui retiennent leur attention. Alors n’attendez plus ! faites nous parvenir vos articles, tous les sujets nous intéressent ! Si vous avez des vidéos à partager : n’hésitez pas, envoyez les nous .   Si vos talents vous portent plutôt à privilégier la photographie : très bien ! Nous serions heureux de pouvoir  diffuser dans ce journal vos photographies . Mais peut-être préfèreriez-vous nous faire découvrir vos talents de peintre ou de sculpteur : rien de plus simple ; Il suffit que vous nous fassiez parvenir de belles photos de vos œuvres et nous les publierons. Car le « journal fou » prétend rendre accessible à un large public, tant les œuvres poétiques de la différence que tous travails artistiques de la marge en devenir…

Le premier numéro de novembre contiendra donc :

  • Un grand dossier sur la question : « le bonheur au travail est-il possible ? » par QUENTIN DALLHUIN
  • La présente ligne éditoriale du journal et l’appel aux artistes en situation de handicap ou de différence : POETE, ECRIVAIN,JOURNALISTE en devenir, PEINTRE,SCULPTEUR ou PHOTOGRAPHE à participer au journal en envoyant leur œuvres. Par PATRICK RAKOTOASITERA
  • Un article sur l’origine du mouvement « hard core » aux Etats-unis , dans la rubrique musique. Par JAONA RAHARISON
  • Un autre article sur la musique contemporaine . Par Patrick Bretelle.
  • Un article sur les requins par VERONIQUE LEGER
  • Un sujet sur la peinture par SYLVIE MARCHAIS
  • Un article sur l’enfermement psychiatrique : les unités de soins fermées sont-elles une fatalité ? Par PATRICK RAKOTOASITERA
  • Et les productions poétiques de PATRICE DELCOURT , et RAPHAEL BOILEVRE dit PAUL.