Chers lecteurs, et lectrices du site, je n’ignore pas que vous semblez délaisser la fréquentation du blog, sans doutes pour la raison que depuis des mois, précisément depuis que le classement du site dégringole, je n’écris plus d’articles de fond.
Je ne retranscris plus l’actualité, ni ne vous présente autre chose que des articles sur la peinture : que les déçus me pardonnent, je ne fais que peindre et si l’actualité me fait réagir c’est bien seulement dans le secret de mon tréfonds intérieur.
Certes, alors qu’à ALEP en SYRIE, l’armée de Bachar el Hassad massacre les insurgés, j’aurais pu écrire, que dis-je crier, dénoncer une stratégie militaire qui bouscule, foule du pied allègrement les conventions de Genève. J’aurais pu essayé de faire savoir aux lecteurs russes comme il est honteux qu’une armée, non contente d’utiliser de nouvelles armes, capables de s’enfoncer dans le sol, d’exploser en grondant comme un tremblement de terre et d’emporter, d’effondrer des immeubles entiers – que cette armée et ses généraux méritent d’être conduits devant le tribunal pénal international, car, sans pitié, cette stratégie consiste à bombarder les écoles et les hopitaux et les marchés et les réseaux d’approvisionnement en eau … que l’ennemi crèvent de soif, de faim, de peur et de terreur et soit broyé dans le feu hurlant ….
J’aurais pu parler de cette campagne présidentielle américaine dont les protagonistes laissent l’électeur incrédule et dépité, hésitant à choisir ou ne pas choisir entre le choléra, la brutalité et l’imbécillité, et l’incarnation de la compromission politique que,bientôt, le fondateur de wikileaks a promis de confondre et faire chuter…
J’aurais pu… J’ai pourtant décidé d’ouvrir une lucarne sur un monde méconnu, un monde absent, oublié des scoops de l’information : le monde des Papou de Papouasie-Nouvelle-Guinée, morceau de terre splendide annexé par l’Indonésie.
Mon tableau doit décrire une scène qui a lieu la nuit, en un endroit un peu reculé, bien isolé des regards : deux hommes, sans doutes des militaires, vont poignarder un chef Papou.
Pour réaliser cette violente scène, une fois n’est pas coutume, je réalise une réinterprétation d’un tableau de CARAVAGE, le génie du clair-obscur. Comble des combles pour moi qui jusqu’à peu bannissait l’emploi du noir et des ombres dans la représentation de mes sujets…
Je me suis inspiré du tableau qui montre trois hommes : le Christ et ses deux bourreaux, dont l’un semble s’apprêter à le flageller. Là le Christ devient le chef Papou et son agresseur enserre dans sa main un couteau, il va le poignarder dans le dos.
Chose étrange, alors que je crois tenir le modelé du torse de mon Papou, un cliché photographique va tout remettre en question. Mon ami, Lionnel qui aime a suivre mon travail et me conseiller dans l’exécution de mes tableaux est émerveillé devant le résultat. Le modelé, l’épaisseur du torse, la lumière, la façon dont la carnation est rendue: tout lui plait, (ce qui d’habitude n’est pas le cas, quand je commence un tableau). Je lui dis que je suis aussi satisfait, mais mon tableau représente un blanc et les papous sont noirs, donc certainement que j’aurais des corrections à effectuer.
Par acquis de conscience sur son portable, Lionnel consulte les images correspondant au travail de CARAVAGE, comme il méconnait son oeuvre . Et là, catastrophe!, il tombe sur une reproduction du tableau. Je suis stupéfaits : la photo que j’ai faite, je l’ai réalisée au musée de Rouen, or elle semble plus claire, les abdominaux du Christ y sont pales, pas cernés d’ocre, ni saillant comme dans sa reproduction qui confère à la scène une impression de vif lyrisme. Les muscles du Christ y sont indiscutablement plus perceptibles et présents… Je suis dépité : mon travail est en comparaison assez médiocre et insipide.
J’attends une journée, en réfléchissant, perplexe et un peu déçu… Le lendemain, je commence par le drapé que je fais violet. Puis j’entame le torse à coup d’ocre et de rehaut marron clair : je suis décidé à donner de l’intensité à mon Papou, en me rapprochant d’une carnation foncée, forcément ce qui m’éloigne du modèle de CARAVAGE, comme les peaux noires ne réfléchissent pas la lumière identiquement aux carnations des peaux blanches.
Le résultat, ci-dessous, sans qu’on puisse dire qu’il s’agisse fidèlement d’un papou , montre , en tous cas un personnage qui n’est pas blanc. Mission presque atteinte…. .
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